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Incohérence des montants des redressements : une décision qui éclaire les recours contre l'URSSAF

Photo du rédacteur: RodolpheBayleRodolpheBayle

La Cour d'appel de Paris, dans un arrêt rendu le 6 septembre 2024, a annulé une mise en demeure émise par l'URSSAF à l'encontre d'une société de placement de mannequins.


Cette décision illustre les enjeux liés aux redressements opérés par les organismes de sécurité sociale et à la manière dont les entreprises peuvent contester de telles décisions, notamment en cas d'incohérence dans les montants réclamés.


L'affaire se concentre sur les cotisations sociales dues pour les mannequins, question complexe au croisement des règles de droit social et du droit de la sécurité sociale.


La SARL [4], société spécialisée dans le placement de mannequins, a fait l'objet d'un contrôle de l'URSSAF portant sur la période 2014-2015. Ce contrôle a donné lieu à plusieurs lettres d'observations émises le 10 juillet 2017.


Ces lettres portaient sur différents chefs de redressement, notamment sur les cotisations sociales dues au titre de rémunérations qualifiées de royalties versées à des mannequins, représentant un montant total de 132 682 euros.


Contestant certaines observations, la société a engagé une procédure devant la commission de recours amiable de l'URSSAF, sans succès. Par la suite, l'URSSAF a émis une mise en demeure en date du 15 janvier 2018, réclamant un total de 159 074 euros, incluant des majorations de retard.


Cette mise en demeure a été contestée par la société devant le Tribunal judiciaire de Paris, qui a rejeté sa demande le 26 juin 2020. La SARL [4] a alors interjeté appel devant la Cour d'appel de Paris.


Le problème juridique


Le cœur du litige réside dans la cohérence des montants réclamés par l'URSSAF dans sa mise en demeure au regard des lettres d'observations préalablement émises. La question posée à la cour était de savoir si l'incohérence des montants figurant dans la mise en demeure par rapport aux lettres d'observations constituait un vice de forme suffisamment grave pour justifier son annulation.


Les prétentions des parties


La SARL [4] demandait l'annulation de la mise en demeure du 15 janvier 2018, arguant que les montants réclamés étaient incohérents et ne permettaient pas de comprendre l'étendue réelle de ses obligations. En outre, elle réclamait le remboursement des sommes versées à titre conservatoire.


De son côté, l'URSSAF reconnaissait certaines incohérences mais soutenait que celles-ci ne justifiaient pas l'annulation de la mise en demeure. Elle se référait à une jurisprudence abondante défavorable aux cotisants en matière de redressements et demandait à la cour de confirmer la décision du Tribunal judiciaire.


Le raisonnement de la cour, incohérence des montants des redressements


La Cour d'appel, dans son analyse, a pris soin d'examiner en détail les éléments de la procédure. Elle a relevé plusieurs incohérences importantes dans les montants réclamés. En effet, la mise en demeure faisait état de cotisations dues pour un montant de 308 799 euros, alors que les lettres d'observations ne mentionnaient que 132 682 euros pour le redressement principal concernant les mannequins.


La cour a rappelé que, selon l'article R. 244-1 du Code de la sécurité sociale, une mise en demeure doit être suffisamment claire pour permettre au cotisant de comprendre l'étendue exacte de sa dette.


La mise en demeure doit notamment mentionner les montants précis et être cohérente avec les lettres d'observations préalablement envoyées.


En l'espèce, l'URSSAF n'avait pas pris en compte l'annulation partielle d'un chef de redressement lors de la procédure contradictoire, ce qui rendait la mise en demeure confuse et inexacte.


Par ailleurs, la cour a souligné que l'absence de concordance entre les montants de la mise en demeure et ceux des lettres d'observations était de nature à vicier la procédure.


Le cotisant ne pouvait ainsi pas connaître précisément les sommes qu'il devait, ce qui constituait une violation des droits de la défense.


En conséquence, la Cour d'appel de Paris a annulé la mise en demeure du 15 janvier 2018 et a ordonné à l'URSSAF de rembourser à la SARL [4] la somme de 132 787 euros, assortie d'intérêts au taux légal à compter de la date de paiement, soit le 15 décembre 2020. La cour a également condamné l'URSSAF aux dépens.


Cet arrêt rappelle l'importance pour les entreprises de bien vérifier les montants et les motifs des redressements opérés par l'URSSAF.


La moindre incohérence dans les calculs ou la procédure peut conduire à l'annulation de la mise en demeure, avec des conséquences financières significatives.


En cas de doute sur la régularité d'un redressement, contactez nous !


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