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Procédure bâclée ? Pas selon la Cour d'appel d'Orléans, qui valide le licenciement pour faute grave et la situation de harcèlement sexuel

Photo du rédacteur: RodolpheBayleRodolpheBayle

Contexte de contestation d’un licenciement pour irrégularité de procédure

Le 18 juillet 2024, la Chambre sociale de la Cour d'appel d'Orléans a rendu un arrêt significatif confirmant le licenciement pour faute grave de M. [X] [W] par la société.

Cette décision fait suite à un litige où le salarié contestait son licenciement, invoquant des irrégularités de procédure et la non-gravité des faits reprochés. 

Cet arrêt clarifie les critères de gravité des faits, les exigences en matière de preuve pour l’employeur, et le respect des procédures légales de licenciement.

Un dossier disciplinaire pour harcèlement sexuel à l’origine du conflit

M. [X] [W], né le 9 septembre 1966, a été engagé par la société Chubb France selon un contrat à durée indéterminée à compter du 4 décembre 2000 en qualité d'ingénieur commercial. 


Initialement affecté à l'agence de [Localité 4], il a été muté à l'agence de [Localité 7] à partir du 1er juillet 2019. 


Le 5 septembre 2019, M. [W] a été mis à pied à titre conservatoire en raison de comportements jugés déplacés et de propos à connotation sexuelle à l'encontre de deux jeunes collègues, Mme [C] et Mme [E]. 


Par lettre recommandée en date du 15 octobre 2019, la société Chubb France a notifié à M. [W] son licenciement pour faute grave.


Le 28 septembre 2020, M. [W] a saisi le conseil de prud'hommes de Tours pour contester son licenciement et obtenir le paiement de diverses indemnités et d'un rappel de salaire pour la période de mise à pied. 


Le 12 octobre 2022, le conseil de prud'hommes de Tours a jugé que le licenciement pour faute grave était fondé sur des faits de harcèlement sexuel, déboutant ainsi M. [W] de l'ensemble de ses prétentions et de toutes les demandes salariales et indemnitaires liées à son licenciement. 

M. [W] a relevé appel de ce jugement le 10 novembre 2022.

La Cour est saisie de plusieurs question épineuses

La Cour avait la charge de trancher les points suivants/

  1. La violation du principe de la non-double sanction : M. [W] a-t-il été sanctionné deux fois pour les mêmes faits par la mise à pied conservatoire et le licenciement ?

  2. L'irrégularité de la procédure de licenciement : L'absence de discussion des faits lors de l'entretien préalable invalide-t-elle le licenciement ?

  3. La matérialité et la répétition des faits reprochés : Les faits reprochés à M. [W] peuvent-ils être qualifiés de harcèlement sexuel justifiant un licenciement pour faute grave ?

La Cour d’appel rejette la double sanction en confirmant la continuité de l’enquête

M. [W] a soutenu qu'il avait été sanctionné une première fois par la mise à pied conservatoire, ce qui empêchait l'employeur de le sanctionner une seconde fois par un licenciement. 

La mise à pied conservatoire est une mesure disciplinaire temporaire prise par l'employeur dans certaines situations de faute grave ou lourde commise par un salarié. Cette mesure permet d'éloigner immédiatement le salarié de l'entreprise en attendant la décision finale concernant une éventuelle sanction disciplinaire, telle que le licenciement.

La Cour d'appel a constaté que le délai entre la mise à pied conservatoire et la convocation à l'entretien préalable avait été mis à profit pour diligenter une enquête interne. 

Cette enquête était nécessaire pour une prise de décision réfléchie suite au signalement des deux jeunes employées. 

La Cour a jugé que la mise à pied conservatoire n'était pas une sanction distincte mais une mesure temporaire permettant à l'employeur de mener une enquête, ce qui justifie qu'il n'y ait pas de double sanction.

Si la Cour confirme une irrégularité de procédure, elle considère qu’elle n’affecte pas sa régularité

M. [W] a soutenu que les faits reprochés n'avaient pas été discutés lors de l'entretien préalable, en violation de l'article L.1232-3 du Code du travail. 

La Cour a reconnu que l'absence de discussion des motifs lors de l'entretien préalable constituait une irrégularité de forme. 

Toutefois, elle a estimé que cette irrégularité n'affectait pas la légitimité du licenciement dès lors que les faits reprochés étaient avérés et graves. 

De plus, des témoins ont confirmé que les motifs du licenciement avaient été signifiés à M. [W] lors de l'entretien, ce qui a permis de rejeter cet argument.

Les faits de harcèlement sexuel sont parfaitement établis pour la Cour d’appel d’Orléans

M. [W] a contesté la matérialité des faits reprochés, invoquant des violations des droits de la défense et des règles de preuve. 

Il a soutenu que les faits étaient isolés et non répétés, ce qui ne permettait pas de les qualifier de harcèlement sexuel. 

La société a produit des témoignages et des comptes rendus d'entretiens montrant que les faits reprochés à M. [W] étaient répétés et constituaient un comportement global inapproprié à l'égard des jeunes femmes.

La Cour a examiné les témoignages des victimes et des collègues de M. [W], confirmant la réalité des faits et leur caractère répété. 

Les propos et comportements de M. [W] ont été jugés dégradants, humiliants et créant un environnement de travail intimidant et offensant. 

En se basant sur ces éléments, la Cour a conclu que les faits reprochés constituaient bien un harcèlement sexuel justifiant un licenciement pour faute grave.

La Cour a également noté que l'enquête interne avait été menée de manière sérieuse et que les faits avaient été confirmés par plusieurs témoins, dissipant ainsi tout doute sur la réalité des faits reprochés. 

La Cour a donc confirmé la décision de première instance validant le licenciement pour faute grave.


La Cour a balayé d’un revers la demande au titre d’un licenciement brutal et vexatoire

M. [W] a réclamé des dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire, alléguant une atteinte à sa réputation. 

Pour rappel, un licenciement est considéré comme brutal lorsqu'il est exécuté de manière précipitée, sans que l'employeur prenne les précautions nécessaires pour respecter les droits du salarié (tel que l'absence de procédure légale). 

Un licenciement est qualifié de vexatoire lorsque les conditions dans lesquelles il est effectué portent atteinte à la dignité du salarié. 

Cela peut inclure des humiliations publiques, des accusations infondées ou diffamatoires, des attitudes dégradantes.

La Cour a jugé que la mise à pied conservatoire et le licenciement étaient justifiés par le contexte de harcèlement sexuel et ne constituaient pas un procédé vexatoire. 

En conséquence, la Cour a débouté M. [W] de sa demande de dommages-intérêts.

En un mot

L’arrêt de la Cour d'appel d'Orléans du 18 juillet 2024 illustre l'importance de la rigueur dans la gestion des comportements inappropriés en entreprise et la nécessité de respecter les procédures légales de licenciement. 

La décision rappelle que les comportements répétés à connotation sexuelle peuvent justifier un licenciement pour faute grave et que les employeurs doivent mener des enquêtes sérieuses et respecter le principe du contradictoire.  CA Orléans, ch. soc., 18 juill. 2024, n° 22/02611. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CA/Orleans/2024/CAP9E4CEAA4658FF07A3F29


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